21.12.2023Alexandre Barras: «C’est assez rare d’être curé dans la paroisse de son enfance»
Être prêtre à Crans-Montana, qui passe de 10'000 à 50'000 âmes en haute saison, n’est pas de tout repos. Le curé Alexandre Barras évoque sa vie au service de Dieu et de ses concitoyens, de même que sa jeunesse où il fut service-man auto, puis chauffeur poids lourds, policier, pompier. Dans cette région de montagne qu'il considère comme le plus beau pays du monde!
L’homme est grand, baraqué. On sent bien que le travail ne lui fait pas peur. Alerte sexagénaire, le curé Alexandre Barras n’a pas hésité lorsque l’évêque lui a proposé de reprendre la paroisse de son enfance. «C’est assez rare d’être curé chez soi, sourit-il en servant le Johannisberg et les flûtes au fromage de l’apéro. Moi j’ai cette chance. J’en suis très reconnaissant au Seigneur. J’ai beau avoir soixante ans, je suis le message du Christ en préservant mon cœur d’enfant à son service et à celui de mes paroissiens. Ça me donne l’énergie d’avoir toujours des projets et de supporter ma tâche quand la paroisse atteint les 50'000 âmes en haute saison.»
Il faut dire que le parcours de Monsieur le curé n’est pas banal: «Enfant, j’ai servi la messe ici. J’ai chanté au chœur de la station. Mais Dieu, je l’ai rencontré plus tard. J’ai eu une vie séculière jeune homme. J’ai été service-man auto, puis chauffeur poids lourds, policier, pompier . Tout cela m’a permis de comprendre que j’étais fait pour une autre vie. Je suis donc entré au Séminaire à Fribourg à l’âge de 28 ans.»
Tenté par les ordres contemplatifs
Pourtant, Alexandre n’avait pas encore trouvé son chemin: «J’ai été tenté d’entrer dans les ordres contemplatifs. J’ai visité à cet effet de nombreuses communautés, dont les capucins, chers à mon cœur. Le Seigneur me disait: «Viens, viens, rejoins-moi». Mais j’ai mis du temps à trouver ma voie dans cette pastorale qui me rend si heureux aujourd’hui.»
«À l’époque, on pouvait être prêtre à 23 ans. Maintenant, il y a beaucoup plus de vocations tardives, ce que je considère comme une chance. Cela nous permet de moins idéaliser les choses, d’être plus proches des problématiques de nos paroissiens, et peut-être même d’être plus forts dans notre vocation.»
Il dit faire partie de ceux qui ne sont pas fondamentalement contre les prêtres mariés. «Mais moi, je ne pourrais pas assumer ma charge sans être 100% disponible pour celles et ceux qui en ont besoin. Pour moi, se donner à Dieu, ce sont des temps de prière chaque jour, c’est ma messe quotidienne, la préparation des baptêmes, des confirmations, des confessions, des mariages, des enterrements. C’est la visite aux malades, les affaires de bureau, ou enfin l’accueil des visiteurs qui viennent me voir dans l’espoir de répondre à leurs questionnements.»
«Noël dure plus d’une semaine»
Un agenda qui peut passer allègrement les 15 heures par jour. «Rassurez-vous, précise le curé Alexandre, à la morte saison, c’est aussi cinq fois moins certains jours. Et je me réserve toujours un temps pour marcher dans la nature, ou dans la paroisse pour rencontrer des gens.»
Mais, pour l’heure, c’est le rush de Noël, l’occasion d’un rappel théologique aux familles qui pensent que la Fête de la Bonne Nouvelle prend fin le soir du 25 décembre: «Bien sûr, la commercialisation de Noël est désormais une réalité. Je peux m’y faire. En revanche, je ne comprends pas les gens pour qui l’esprit de Noël se termine au soir du réveillon. En réalité, il s’étend jusqu’à l’Épiphanie, le baptême de Jésus. On devrait donc tous se souhaiter un Joyeux Noël dans la Paix du Christ pendant plus d’une semaine!»
Et d’ajouter: «Pour nous, les curés, c’est un bonheur précieux. Les églises sont pleines. Les familles – surtout celles de nos visiteurs – viennent au grand complet. Il y a donc toute la vie et la bonne humeur des enfants.»
De Bach à Jésus
Jean-Sébastien Bach l’a transcrit dans un choral mémorable: «Jésus que ma joie demeure»; le curé Barras en est une illustration parfaite: «Cette joie de la naissance du Christ, j’aime bien la conjuguer au quotidien, dans mes homélies, avec l’équipe pastorale, le conseil de communauté. Et, surtout, lors de la rencontre de nos visiteurs étrangers pour quoi il s’agit peut-être, durant les fêtes de fin d’année, de la seule occasion de célébrer un sacrement tous ensemble.»
Par Jean-François Fournier
«Le plus beau pays du monde»
Gamin, Alexandre skiait tout le temps et a noué des liens très puissants avec Crans-Montana: «La montagne est sublime, c’est le plus beau pays du monde. Et le plateau nous permet des journées très ensoleillées. Ici, on est partout à cinq minutes de la nature. J’aime bien aussi faire vivre Crans-Montana en dehors de ses limites géographiques. En effet, l’histoire du tourisme nous a valu parfois une étiquette un peu snob que nous ne méritons pas.»